« L’ère de l’électricité » !
Retrouvez dans cet article une synthèse des principaux enseignements du World Energy Outlook 2024.
Fin 2024, l’AIE (Agence Internationale de l’Energie), organisme mondial de référence publiait son très attendu, World Energy Outlook 20241.
Ce rapport annuel analyse les tendances mondiales de l’énergie et explore différents scénarios d’évolution de la demande et de la production. En bref, des données et des explications cruciales pour comprendre la transition énergétique en cours.
Une révolution énergétique semble se matérialiser dans cette édition 2024.
Une sécurité énergétique soumise aux risques géopolitiques
En 2022, l’invasion de la Russie en Ukraine rappelait au monde les risques que la géopolitique fait peser sur la sécurité énergétique. En quelques mois, l’Europe a dû trouver des solutions alternatives pour assurer son approvisionnement et modérer l’inflation des prix de l’énergie.
En 2024, sur fond de guerre au Moyen-Orient, l’AIE alerte sur « les risques persistants pour la sécurité énergétique du monde ». Le risque de nouvelles perturbations majeures est désormais considéré comme « très élevé » par l’organisme de référence.
L’excellente nouvelle : selon l’IAE, la transition énergétique vers une électricité décarbonée modifie les dépendances des chaînes d’approvisionnement et contribue à améliorer la sécurité énergétique.
En électrifiant, on réduit nos émissions de CO2 et nos vulnérabilités géopolitiques.
Les fossiles toujours au cœur du système énergétique mondial
Le mix énergétique mondial reste très fortement fossile (80% en 2023, contre 83% en 2011). La hausse de la demande mondiale en énergie freine la transition énergétique.
En effet, malgré des records d’installations « d’énergies propres » en 2023, les 2/3 de la hausse de la demande mondiale en énergie ont été assurés par le recours aux énergies fossiles.
Cette dépendance aux énergies fossiles éloigne le monde de sa trajectoire de décarbonation qui doit permettre d’atteindre la neutralité carbone en 2050.
L’excellente nouvelle : la transition énergétique s’accélère et le pic des trois énergies fossiles (gaz, pétrole charbon) devrait avoir lieu d’ici 2030.
Une électrification en cours
C’est probablement l’information la plus marquante de cette édition 2024 : le système énergétique est en train de changer de paradigme. La déclaration de Fatih Birol, le directeur de l’AIE, résume la révolution en cours :
« Nous avons connu l'ère du charbon et l'ère du pétrole, et nous entrons maintenant à grande vitesse dans l'ère de l'électricité, qui définira le système énergétique mondial à l'avenir ».
Rendons-nous compte de ce que signifie ce changement d’ère tant notre mode de vie actuel repose sur le système énergétique fossile. L’ingénieur Jean-Marc Jancovici utilise même l’expression de « civilisation fossile » pour illustrer l’importance de cette source d’énergie sur notre monde.
Pourtant, le changement d’ère est bien en cours. En effet, sur les 10 dernières années, la consommation d’électricité à augmenté deux fois plus vite que la demande énergétique globale.
Cette électrification des usages est notamment portée par l’industrie et la mobilité. En Chine, un véhicule neuf sur deux est désormais électrique. L’Agence Internationale de l’Energie prévoit un ratio équivalent pour le monde entier en 2030.
Cette électrification de la mobilité se produit à un rythme plus élevé qu’attendu. Le rapport indique même que « l’essor de la mobilité électrique prend de court les producteurs de pétrole ».
L’excellente nouvelle : l’électrification des usages devrait nous aider à réduire notre dépendance aux énergies fossiles.
Une électricité de plus en plus « propre »
L’électrification des usages n’est pas une condition suffisante au verdissement total de nos systèmes énergétiques. Encore faut-il que cette électricité soit produite à partir de sources bas carbone (énergies renouvelables ou nucléaire).
En effet, l’électricité n’est pas une énergie primaire, ce n’est qu’un vecteur énergétique fabriqué à partir de quelque chose. Or, ce quelque chose est pour le moment majoritairement fossile à l’échelle mondiale.
En 2023, le charbon (coal sur le graphique) et le gaz (natural gas sur le graphique) sont à l’origine d’environ 60% de la production d’électricité mondiale.
~AIE - Production mondiale d'électricité en milliers de TWh~Si la photo à l’instant T donne l’avantage aux sources fossiles, la dynamique est clairement du côté des énergies renouvelables.
Au niveau mondial, le soleil (photovoltaïque) et le vent (éoliennes) progressent de façon exponentielle.
L’AIE précise que le coût de ces technologies continue de baisser ce qui rend les investissements très attractifs. Près de 2 000 milliards de dollars (USD) sont investis par an dans les projets « d’énergie propre », soit presque le double de ceux consacrés aux nouveaux approvisionnements en pétrole, gaz et charbon réunis.
Résultat : l’AIE prédit que « la moitié de l’électricité sera d’origine bas carbone avant 2030 ». Rappelons qu’en France, 90% de notre électricité est déjà « bas carbone » grâce au nucléaire et aux énergies renouvelables (hydroélectricité notamment).
L’excellente nouvelle : ce verdissement mondial en cours des sources de production de l’électricité devrait réduire significativement nos émissions de gaz à effet de serre.
En conclusion…
Un nouveau système énergétique mondial centré sur l’électricité est en train de prendre forme. Cette transition énergétique s’accélère mais reste en deçà du rythme nécessaire pour atteindre nos objectifs climatiques.
Concluons sur une note positive en citant le rapport de l’AIE :
« Le monde a le besoin et les moyens d’aller beaucoup plus vite. […] L’évolution des choix des consommateurs et des politiques publiques jouera un rôle déterminant pour l’avenir du secteur de l’énergie et l’efficacité de la lutte contre le changement climatique. »
Allons-y !
1 https://www.iea.org/reports/world-energy-outlook-2024?language=fr